mardi 13 mai 2008

Jean Malfoy.



Une enquête de Pierre-Alain Xantrailles.

Pierre-Alain Xantrailles mène l'enquête sur ce mystérieux syndrome qui touche les Français de Tokyo. Aujourd'hui, rencontre avec Jean Malfoy, cadre supérieur, expatrié depuis plusieurs années et, d'après le commentaire qu'il a laissé sur notre répondeur, passablement dépressif. Installé confortablement au bar du Park Hyatt de Shinjuku, Xantrailles contemple avec un rictus cynique la flaque de dégueulis architectural semblant s'étendre à l'infini. M. Malfoy pénètre dans la salle, l'air sec, ravagé. Il commande un bock d'awamori et s'installe poussivement à côté de Xantrailles. Interview.

"
- M. Malfoy, racontez-nous tout. Qu'est-ce qui vous a amené à Tokyo ?

- Eh bien, c'est moi qui ai demandé l'expatriation. Voyez-vous bien, ce pays me faisait fantasmer depuis longtemps, pour plusieurs raisons - certaines d'ordre esthétique, d'autres politique et d'autres encore libidinale. A moins qu'elle ne se confondent les unes les autres, ce qui ne me surprendrait guère. C'est d'abord cette société magnifique, sur le papier, qui m'a fasci/né. Un idéal, n'ayons pas peur des mots, pour le sarkozyste de conviction que je suis, voyez-vous bien.

- Pourtant, notre actuel président ne semble pas faire grand cas du Japon...

- Oui, et c'est fort surprenant. D'abord, notez l'absence de toute velléité contestataire, de toute opposition digne de ce nom. Rien qui dépasse le stade larvaire, les Japonais acceptent tout. Pas de manifestations, de grèves, de syndicalisme risible... Ensuite, l'identité nationale n'a pas ici besoin d'un ministère. "La vraie religion d'un Japonais, c'est d'être Japonais", disait en substance Donald Richie qui n'avait pas tort. Hostiles à l'immigration, au métissage, se méfiant de toute corruption identitaire, voilà un excellent peuple de bons petits soldats. Regardez leurs habitations : l'esthétique de la caserne, qui devient flagrante lorsque l'on se rapproche des banlieues dortoirs. Même ce fameux cerisier, qui pourrait passer pour un arbre innocent, est lourd de sens, voyez-vous bien. Il s'agit de tomber sans se plaindre pour participer à la vie du gros arbre qui nourrit ses branches, je vous laisse continuer à filer la métaphore. Ici, on est dans le mot d'ordre Pognon, Famille, Patrie, sans complexe. Pas de honte à aimer le fric, et c'est vrai que c'est bon... (rire mesquin) Vous voyez, il y a peu une pub osait afficher le slogan "You are what you buy" sans que personne n'y trouve à redire ! Pas un qui bronche ! Les présupposés du libéralisme ont gagné, dans les têtes et dans les corps...

- Dans les corps ?

- Eh oui Xantrailles ! Regardez les minettes dans la rue : toutes à poil ! On est dans un pays capitaliste, il faut que l'homme puisse comparer la marchandise avant de s'engager !

- Vous dérapez un peu, Monsieur Malfoy...

- Certes et je vous prie de m'en excuser. Bref, le Japon : paradis d'homme de droite, un pays qui devrait avoir une valeur d'exemple pour notre pays déclinant, paralysé voyez-vous bien par d'anachroniques relents socialo-marxistes...

- Mais alors, dans un tel "paradis", qu'est-ce qui explique votre teint hémorroïdaire ?

- Simple, mon cher. Je suis nostalgique des affrontements de la vie historique. Ces veaux de Japonais obéissent au mieux par pragmatisme, au pire par inertie ! On a envie de les secouer, de voir un peu d'élan, d'enthousiasme, de hauteur de vue ! Un supplément d'âme à cette société bassement mercantile ! Et c'est un pur réac qui vous dit ça ! Ah, je regrette les droitards français, messianiques, passionnés ! Et même les pneus brûlés de la CGT ! Au moins un peu de vie là-bas ! Ici on est dans le figé, dans le gangréné, dans l'idéal du Dernier Homme de Zarathoustra ! Merde à la fin nom de Dieu ! Qu'est-ce que je fous là ?!

- Vous pourriez envisager un retour au pays...

- (subitement nerveux) Oui ! Mais avant, J'VAIS FRAPPER UN GRAND COUP ! Mishima ca s'ra d'la patée pour chat à côté ! Faire un massacre ! Vous verrez Xantrailles !

- Plaît-il ?

- (la bave aux lèvres) Vous verrez bien... J'vais t'les réveiller ces amibes !

M. Malfoy, pour une raison restée mystérieuse, se mit à enchaîner de frénétiques coups de glotte, comme un Maya en furie. Le personnel du bar nous fit signe de partir. J'appelais donc deux taxis et pris congé de mon singulier interlocuteur, sarkozyste déçu de son Paradis et de ses coussins dorés."



La publicité évoquée par Malfoy. En cas de problème d'affichage, cliquez sur l'image pour l'afficher dans une nouvelle fenêtre. Nous pouvons sans peine comprendre que la jeune femme de gauche est une cruche, et celle de droite un légume. C'est comme cela qu'ils nous aiment. (Note de P-A X)

4 commentaires:

Syndrome de Tokyo a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Anonyme a dit…

On sent la haine du Japon...et quelle aigreur. En fait je crois bien que vous crevez d'envie de vivre au Japon. Vous nagez en plein phantasme. Vous sentez la frustration. Vous rêvez de frottis-frotas aux heures de pointe dans la Yamanote. Vous n'êtes bon qu'à souiller votre édredon français.
Vous ne pouvez pas comprendre. Ce petit serrement de coeur à 17h quand le pays entier dit son harmonie profonde, dans une énigmatique musique.
Continuez à rêver. Ici, les femmes sont douces, la bière est fraîche et mêmes les odeurs de canalisation sont délicieuses à respirer.

Anonyme a dit…

il etait temps de dire que ce ramassis de mensonges et d ordures sent mauvais. et d abord qui etes vous?

Anonyme a dit…

Ce serait bien que des gens un peu positifs parfois disent aussi ce que la vie japonaise peut avoir de bon et de beau. Parce qu'ici ca sent le renferme et l'ordure...
Takashi a raison: l'importance de la musique au Japon. Qui berce, qui rythme. Celle de 5 heures pour les enfants oui, mais celle des trains également, à chaque entrée en gare. Comme tout cela me manquera, qui fait mon décor sonore. Ô Japon éternel, plein de bruits et de fureurs (et de foufounes).